Vous connaissez ce moment gênant où vous mélangez votre clé USB avec une clé de bagnole, partez en road trip avec un dinosaure, et vous rendez compte que vous êtes dans un mauvais épisode de Jurassic Park croisé avec Interstellar ? Eh bien 65 : La Terre d’avant c’est un peu ça. Un film qui semble avoir été imaginé lors d’une soirée où les mots “dinosaure”, “futur”, et “Adam Driver” ont été tirés au sort dans un chapeau. Et comme le destin ne fait pas toujours bien les choses, voilà ce que ça donne.
Dans un passé lointain (mais avec des mecs qui s’appellent Mills, comme si on était en 2023), un pilote de vaisseau spatial transporte des passagers cryogénisés vers une autre planète. Sauf que bim ! Astéroïde en approche, crash sur une planète. Et devinez laquelle ? La Terre. Mais il y a 65 millions d’années. Avec des dinosaures pas contents et une météo digne d’une apocalypse. Mills, joué par Adam Driver (qu'on sent à deux doigts de dire "j’ai tué Han Solo pour en arriver là ?"), doit protéger la seule autre survivante, une petite fille, tout en évitant de finir snack de raptor.
✔ Adam Driver, qui donne tout, même avec un scénario qui donne pas grand-chose.
✔ Des dinosaures (parce que bon, des dinosaures, ça fait toujours plaisir).
✔ Le film ne dure qu’1h30, et dans notre époque de blockbusters à rallonge, c’est presque un service public.
✔ Quelques jolis décors numériques (surtout quand on ne regarde pas de trop près).
✘ Un scénario plus vide qu’un frigo de colocataire à la fin du mois.
✘ Des dialogues qui feraient passer Siri pour un prix Nobel de littérature.
✘ Des incohérences temporelles et scientifiques qui donnent envie de manger son diplôme de SVT.
✘ Le dinosaure final qui ressemble à un gros lézard sous acide (non, vraiment, on dirait un skin modifié de T-Rex sur un site louche).
✘ Une musique si générique qu’on dirait qu’elle sort d’un logiciel de musiques libres de droits appelé “EpicBattleSound_07.wav”.
Alors oui, on ne peut pas dire qu’Adam Driver ne s’implique pas. Il court, il grimace, il fait son regard de “j’ai vu des choses que vous ne croiriez pas”, et il tente de créer une relation touchante avec la petite Koa. Sauf que voilà, sans dialogues crédibles ni vraie évolution narrative, la relation entre Mills et Koa est aussi émouvante qu’un tutoriel PowerPoint.
On le sent tiraillé entre son métier d’acteur sérieux et l’envie de crier “je vais tirer sur des dinos avec un fusil laser, les gars !”. Bref, un peu comme si Kylo Ren s’était perdu sur Isla Nublar.
Étonnamment, pour un film vendu sur “des dinosaures + Adam Driver + action”, on voit assez peu de dinosaures. C’est un peu comme aller dans un resto qui s’appelle “Le Roi du Canard” et découvrir que le plat signature, c’est des pâtes au beurre. Ils sont là, les dinos, oui, mais souvent en fond, dans l’ombre, ou très vite expédiés. Loin de la tension de Jurassic Park, ici on est plus dans le “j’ai croisé un vélociraptor pendant que je faisais pipi dans un buisson”.
Il y a bien quelques séquences d’action sympas, avec un petit T-Rex final pour la forme, mais rien de vraiment marquant. Ni inventif, ni palpitant, juste “ok, ça passe”. On n’a pas vraiment peur, on n’est pas très impressionnés non plus. On est juste… là.
65 tente de jouer la carte de l’émotion, de la perte, du rapport parent-enfant, du trauma non résolu. Mais avec des dialogues réduits à “Regarde !” / “Cours !” / “Non !” / “Viens !” et une narration aussi fluide qu’un vélo dans du sable, c’est compliqué.
Il y a même une tentative de révélation finale (“c’était la Terre !”... mais on le savait dès l’affiche, donc merci pour le suspense foireux), et une symbolique un peu bancale sur l’extinction des dinos et la survie de l’humanité. Le tout noyé dans un montage parfois confus et des ralentis inutiles (on t’a vu, Zack Snyder junior).
Et pourtant, le film avait un budget de 45 millions de dollars, ce qui aurait pu permettre de créer quelque chose de vraiment impressionnant. Mais non. Effets spéciaux corrects mais pas fous, mise en scène sans folie, et direction artistique fade. Même les armes futuristes ont l’air d’avoir été imprimées en 3D dans un garage de province.
On a envie de croire que 65 était un pari de fin de soirée entre scénaristes. Genre :
– “Je te parie que tu peux pas écrire un film avec un seul acteur connu, une gamine muette, et des dinosaures, le tout dans le passé mais avec des fusils lasers.”
– “Chiche.”
Et Sony a dit oui. Voilà.
Alors non, ce n’est pas le pire film de science-fiction que j'ai vu, mais ce n’est pas non plus un indispensable. Il y avait matière à faire mieux, à créer quelque chose de vraiment original ou fun. À la place, on a un film tiède, ni vraiment mauvais, ni bon, qui se contente de cocher des cases sur la check-list du film d’action sans âme.