Il y a des films qui nous font voyager à travers le monde. D'autres nous emmènent aux confins de l'univers. Here, lui, fait le choix audacieux de ne jamais bouger d’un centimètre. Oui, vous avez bien lu. Pendant deux heures, la caméra reste immobile, observant les personnages défiler à travers les âges, comme un vieux canapé qui en a vu des vertes et des pas mûres.
L’idée est originale, certes. Après tout, pourquoi se fatiguer à suivre une intrigue dynamique quand on peut simplement observer un coin de salon prendre de la valeur immobilière à travers les siècles ? Un vrai before/after architectural, mais sans la satisfaction de la rénovation.
Tom Hanks et Robin Wright sont de retour ensemble à l’écran. Super nouvelle ! Enfin, sur le papier. Parce qu’en réalité, on a surtout droit à leur version rajeunie numériquement, façon figurines en cire animées. Si vous pensiez que les personnages en CGI du Pôle Express étaient un peu flippants, Here vient relever la barre du malaise.
Le talent des acteurs n’est pas en cause (ils feraient pleurer une pierre s’il le fallait), mais leur prestation est handicapée par cette technologie douteuse. Quand Tom Hanks censé être ado ressemble à un homme de 60 ans avec un filtre Instagram, il y a comme un léger problème d'immersion.
L’idée de montrer un même endroit à différentes époques avait un vrai potentiel. On aurait pu explorer des moments-clés de l’histoire avec intensité et émotion. Sauf qu’ici, le film opte pour une approche ultra contemplative. Traduction : on regarde un mur pendant deux heures pendant que des personnages racontent leur vie.
On espérait un Forrest Gump philosophique et émouvant, mais on obtient plutôt une publicité interminable pour une agence immobilière.
Le film repose énormément sur des effets numériques pour montrer le passage du temps, les changements d’époque, et bien sûr, la fameuse technologie de rajeunissement des acteurs. Hélas, tout ça manque cruellement de naturel. Les visages lissés par ordinateur donnent aux personnages un air figé, et certaines transitions temporelles sont plus artificielles qu'un filtre Snapchat mal appliqué.
Résultat : au lieu d’être émerveillé, on passe son temps à se demander si c’est un film ou une version longue d’une démo technologique de logiciel d’effets spéciaux.
L’intention était belle : parler de la vie, du temps qui passe, des souvenirs qui restent. Un projet qui aurait pu être bouleversant, si seulement le film ne s’embourbait pas dans son propre concept. À force de vouloir être poétique, il devient longuet. À force de vouloir être innovant, il en devient froid.
On aurait aimé vibrer, être transporté, ressentir le poids du temps qui passe… mais au final, on ressent surtout le poids du temps qui ne passe pas pendant la séance.